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La place des femmes dans les organisations
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À l’occasion de l’édition 2020 de son colloque annuel Cultures Services sur le thème de “La Symétrie des Attentions dans un monde nouveau”, l’Académie du Service a reçu de nombreux intervenants inspirants.
Au programme de cette journée riche en enseignements, de nombreux sujets contemporains ont été abordés, notamment celui de la place des femmes dans l’entreprise. En cela, deux thématiques différentes sont abordées : Angélique Gérard revient sur la question le féminisme et de leur apport, Hélène Bonnet évoque sa maladie et le programme qu’elle a créé afin de faciliter le retour des femmes atteintes par des maladies au travail.
La place des femmes dans les organisations est le thème de notre nouveau manifeste qui est sorti à l’occasion de ce colloque annuel. C’est aussi le thème de la première keynote qui rassemble deux femmes inspirantes, qui font bouger les lignes et apportent beaucoup au monde et aux organisations : Angélique Gérard et Hélène Bonnet.
Sommaire
Non, l’égalité homme femme n’est pas encore gagnée
Cette keynote débute par l’intervention d’Angélique Gérard, Directrice de la Relation Client du Groupe Iliad – Free, qui est aussi l’une des rares femmes business angels et parmi les plus influentes en France avec à ce jour une vingtaine d’investissements à son actif. Angélique Gérard est également une femme engagée qui a récemment publié un livre intitulé Pour la fin du sexisme ! Féminisme à l’ère post “me too”, aux éditions Eyrolles. Elle reverse ses droits d’auteur à deux associations : Led by Her qui aide des femmes victimes de violences à devenir entrepreneuses et SOS Papa qui milite pour la garde équitable des enfants. Elle a été identifiée début 2020 par Forbes parmi les 40 femmes françaises les plus influentes.
Les quotas, pour ou contre ?
Jérôme Fière, développeur de Talent Relationnel de l’Académie du Service et animateur de cette keynote, commence par poser à Angélique Gérard la question des quotas en entreprise. “ J’ai une position qui a beaucoup évolué sur le sujet ces 10 dernières années.” commence-t-elle. “Les quotas ont sûrement des effets bénéfiques. Ils ne vont pas résoudre les problèmes et pas celui de l’égalité au sein des entreprises, mais c’est un véritable outil parce qu’il y a cet effet mécanique”, poursuit-elle.
Angélique Gérard déclare avoir personnellement bénéficié de la loi Copé-Zimmermann qui exige d’avoir au moins 40% de femmes au sein des conseils d’administration au sein des entreprises de plus de 250 salariés. S’il y a plus de femmes au sein des CA, on peut espérer avoir des politiques salariales et de recrutement beaucoup plus équitables. Elle clôt cette question en affirmant qu’il faut avant tout changer les mentalités au sein des entreprises.
Les contes de fées, c’est du “fake”
Maintenant place à l’allocution d’Angélique Gérard qui débute ainsi : “Je suis une fille. Je me suis aperçu très tôt que j’étais une fille.” Elle raconte là un conditionnement séculaire qui a influencé toute une génération de femmes et qui a encore un impact aujourd’hui.
La société prépare les jeunes filles à devenir des princesses avec les contes de fées et notamment les Disney. L’unique objectif d’une princesse est de trouver son prince charmant. Et oui comme nous le dit si bien Angélique Gérard : “C’est le prince qui nous rend princesse. Le prince existe indépendamment, mais la princesse, non !”
De là naît une idée de dépendance à la gent masculine. La princesse s’élève grâce au prince. Si elle ne le rencontre pas, elle reste à la maison et fait le ménage. “Son destin est tout tracé !” s’exclame Angélique Gérard.
Comment combattre ce conditionnement séculaire ?
Ce qu’elle nous narre est le récit de l’arrivée d’une petite fille dans le monde social dans lequel elle dénonce un “bon lavage de cerveau” et même une propagande.
“C’est normal !” dit-elle avec ironie. Angélique Gérard définit la norme comme ce qui est fixé par le plus grand nombre, pour le plus grand nombre. Elle constate que cela n’a rien à voir avec la justice et l’égalité.
“Ceux qui s’élèvent contre la norme sont au choix pourchassés, bannis, réparés, enfermés ou tués.”
La société a évolué. Internet est passé par là. Mais, Angélique Gérard insiste : “Nous traînons avec nous des siècles de conditionnement, encore maintenant. Ça laisse des traces…”
Pour sortir du schéma dit “normal”, Angélique Gérard déclare : “Nous avons besoin de l’engagement de chacun et chacune d’entre nous. Il n’y a aucun pouvoir à prendre. Il faut vivre ensemble.” Trop de frustrations et de malheurs autant pour les femmes que pour les hommes en découlent. Elle ajoute : “Même la virilité est un mythe à revoir.”
L’importance du féminisme
Angélique Gérard se confie avec sincérité sur son déclic de son engagement féministe. Lors d’un entretien, une journaliste lui demande : “Que faites-vous pour les femmes ?”. Angélique Gérard est interloquée. Elle lui répond : “Je ne fais rien.” Et c’est ce moment qui la conduit à s’éveiller à cette cause en se tournant tout d’abord vers les femmes autour d’elle.
Elle ressent un sentiment d’imposture qui oblige les femmes à prouver davantage ce qu’elles valent, à sur performer pour se sentir légitimes dans une équipe composée majoritairement d’hommes. Elles sont ralenties dans leur carrière et se mettent souvent des freins personnels. Angélique Gérard interroge : “Pourquoi sommes-nous si dures avec nous-mêmes ?” Les femmes ont intériorisé qu’elles étaient inférieures aux hommes. Elle comprend qu’elle a un rôle à jouer et des choses à défaire.
L’ouragan médiatique #metoo a cultivé la notion de sororité. Angélique Gérard souligne qu’il est important que les femmes se construisent des repères ensemble pour ne pas se sentir isolées.
Angélique Gérard poursuit son intervention sur des chiffres et un constat factuel concernant le lourd impact économique du sexisme dans les entreprises françaises (environ 7% du PIB).
Main dans la main, elle pense que l’on peut aller vers une société plus apaisée et plus égalitaire. Même si certaines personnes pensent qu’avec plus de lumière sur le féminisme, le problème est maintenant résolu, Angélique Gérard dit avec fermeté : “Non, l’égalité homme-femme n’est pas encore gagnée. Avant de conclure, nous avons besoin de toutes les bonnes volontés… des hommes et des femmes !”
Cette intervention se termine sur une musique toute symbolique de Grand Corps Malade intitulée Mesdames. Un hommage aux femmes.
Prendre soin de soi pour prendre soin des autres
Jérôme Fière accueille avec une émotion particulière Hélène Bonnet, chercheuse depuis 20 ans chez Sanofi. Elle prend aujourd’hui la parole pour raconter son combat contre la maladie, les difficultés rencontrées, mais surtout les soutiens sur lesquels elle a pu compter et enfin le programme d’accompagnement innovant destiné à tous les collaborateurs de Sanofi en France touchés directement ou indirectement par le cancer. Ce programme s’appelle “Cancer & Travail : Agir ensemble” ; elle s’y consacre entièrement au sein de la RSE de Sanofi.
L’expérience de sororité
Hélène Bonnet commence son discours ainsi : “On sait tous que l’on est vulnérable.” Mais il est souvent très difficile d’en parler dans la cité, dans la vie privée et au travail.
À la suite d’un diagnostic de cancer du sein très agressif, elle fait l’expérience de la sororité et de la puissance du lien.
Fraîchement débarquée à Paris, loin de sa famille et ses amis, elle vit seule avec son fils de 9 ans. Ce sont les parents d’un ami de son fils qui vont lui ouvrir leurs portes et notamment Annick Fière qui sera d’un grand soutien.
Au travail, ses collègues vont chercher à comprendre pourquoi elle est absente. Elles vont même se rendre chez elle. Ce sont aujourd’hui des amies proches.
Puis vient le retour au travail. Hélène Bonnet pense que ce combat contre la maladie est derrière elle. Elle déclare : “ La maladie désynchronise des autres, de vous-même. J’ai cherché à comprendre comment je pouvais, alors que j’étais sur le quai avec des béquilles, monter dans le train qu’est l’entreprise ; ce train lancé à grande vitesse.”.
Hélène Bonnet nous dit qu’elle a fait sur elle un travail de chercheur pour identifier quels étaient les leviers lui permettant de transformer cette histoire, comme elle avait pu le faire dans sa vie privée.
“Pendant la maladie, j’ai appris à demander de l’aide. Et j’ai compris que seul, aucun de nous n’est grand chose.”
Le programme “Cancer & Travail : Agir ensemble”
En chiffres…
- En France, 3,8 millions de personnes vivent avec ou après un cancer dont plus de 1 million sont au travail.
- 60% des personnes, 5 ans après, ont encore des séquelles insuffisamment prises en charge.
- 44% d’entre elles déclarent avoir une santé mentale et une vie quotidienne perturbées.
- 3 millions d’aidants d’une personne confrontée à un cancer et qui travaillent.
Hélène Bonnet nous parle des deux principaux leviers développés au sein du programme “Cancer & Travail : Agir ensemble”
Levier 1 : œuvrer pour changer le regard
Changer le regard c’est quoi ? Prendre la parole en interne, en externe, expliquer, raconter, nous explique-t-elle. “C’est quoi l’histoire ? Qu’est-ce qu’on vit ? La pudeur est forte. Mais quand on ne comprend pas ce que l’autre vit, comment l’aider ? J’ai décidé de parler” poursuit Hélène Bonnet.
Elle raconte : “Nous avons réfléchi à ce qui nous avait réussi : être vu dans notre vulnérabilité, mais aussi pouvoir travailler parce que le travail fait partie de la guérison et du lien social.”
Ils ont alors construit des espaces confidentiels au sein même de Sanofi pour pouvoir aider toute personne impactée ou démunie face au cancer grâce à des équipes pluridisciplinaires, des personnes ayant des savoirs d’expérience c’est-à-dire qui ont été confrontées dans leur chair par la maladie, qui ont bousculé leur perception, qui ont cherché des solutions et qui ont dialogué avant de prescrire. Hélène Bonnet précise que 150 personnes sur les sites de Sanofi en France ont été formées à une écoute “Cancer & Travail”.
Levier 2 : permettre au collectif de rentrer dans une dynamique de travail
Hélène rebondit sur l’introduction faite par Jean-Jacques Gressier, leader au service de l’équipe de l’Académie du Service, en ouverture du colloque : “Une intention, c’est bien mais il faut la faire vivre”. Au sein du programme, Hélène Bonnet essaye de faire dialoguer l’intérieur et l’extérieur. Qu’est ce qui fait que je suis capable de faire mon travail ? Les spécialistes diront : que vous faites plein de choses qui ne sont pas dans votre description de poste et qui sont donc invisibles. Hélène Bonnet nous explique que les rendre visibles c’est faire un travail de modélisation pour pouvoir les rendre accessibles au plus grand nombre.
Pour cela, ils ont ouvert des axes de recherches pour collaborer avec des intervenants externes, pour contribuer et partager des outils qu’ils auraient créés à travers leurs expérimentations.
“C’est parce que je suis écoutée, c’est parce que je suis vue par l’autre sans être jugée que je vais pouvoir la dépasser et remettre en marche tous mes savoirs d’expériences pour me remettre au travail. Et me remettre au travail, c’est m’inscrire dans la vie et dans la cité.”
Hélène Bonnet conclut ainsi : “Et si la place des femmes y compris en entreprise était d’oser l’écoute, le soin et pourquoi pas aller jusqu’à l’amour.”
Retrouver le compte-rendu de notre colloque Cultures Services 2020 et l’ensemble des témoignages inspirants de nos intervenants en téléchargement gratuit ici.